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Le climat, une affaire d’États

Les îles Robeson
Les îles Robeson de l’archipel San Blas au Panama menacées par la montée des eaux © Yann Arthus-Bertrand

L’homme émet des gaz à effet de serre d’un bout à l’autre de la planète. La lutte contre le changement climatique est donc l’affaire de tous. Pour préserver le climat, les conférences internationales sont essentielles : la difficulté est de mettre d’accord des pays qui ont des intérêts divergents.

Pourquoi un droit international du climat ?

Ce serait tellement plus simple si le climat ne changeait que dans les pays qui émettaient des gaz à effet de serre… Tellement plus pratique si la température ne grimpait qu’au-dessus des panaches de fumée émanant des pots d’échappement ou des centrales à charbon. Dans cette hypothèse, chaque État aurait eu vite fait de diminuer sa consommation d’énergie pour réduire ses émissions. Le problème est que le CO2 ou le méthane émis à Paris, Bombay ou Dubaï ne reste pas dans le ciel de Paris, Bombay ou Dubaï. Les gaz se mélangent très vite, sont intraçables et vont parfois produire des effets très loin de leur source d’émission. Le changement climatique est une menace planétaire. La lutte contre le changement climatique nécessite donc la collaboration de tous.

Aucun État ne peut seul prétendre résoudre le problème. C’est en prenant conscience de cela qu’il y a trente ans, l’Organisation des Nations unies (ONU) a décidé de mettre en place un droit climatique international. Ce droit est à l’origine des fameuses « COP » qui ont lieu chaque année depuis 25 ans. Les COP, ce sont les « Conférences onusiennes des parties » sur le changement climatique. Une COP a beau avoir des défauts et des lenteurs, elle réussit cet exploit de mettre quelque 200 nations autour de la table pour parler de l’urgence climatique. Avec parfois ce petit miracle de mettre d’accord des pays aussi différents que les champions de l’écologie, les monarchies pétrolières, les fous furieux de la croissance et les îles menacées de disparition par la montée des océans.

Les premières alertes des scientifiques, la création du GIEC

C’est la compréhension du changement climatique et de la responsabilité humaine dans ce changement qui a amené la communauté internationale à se saisir du sujet à la fin des années 1980. Si le phénomène de l’effet de serre a été décrit par des scientifiques il y a déjà deux siècles, c’est seulement il y a quarante ans que les États ont pris conscience de la menace.

En 1979, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) organise la première conférence mondiale sur le climat. Elle y affirme « avec une certaine assurance que la combustion des sources d’énergie fossiles et la déforestation ont augmenté, augmentent et augmenteront probablement dans le futur le taux de dioxyde de carbone ». Il est « plausible que cette augmentation conduise à un réchauffement global des températures ». La même année sort le rapport Charney, un texte capital. Commandé par la Maison Blanche, ce rapport scientifique avertit qu’un doublement de la concentration de CO2 dans l’atmosphère entraînerait une hausse des températures comprise entre 1,5 et 4,5°C. Mais les hommes politiques laissent passer l’alerte car à cette époque aucun effet du changement climatique n’est immédiatement décelable.

1ère réunion du GIEC
Première réunion du GIEC en 1988 © GIEC

Une décennie plus tard, en 1988, un climatologue réputé, James Hansen, également membre de la NASA, tire de nouveau la sonnette d’alarme et prévient le Sénat américain du lien entre les activités humaines et le réchauffement que l’on commence à observer. Quasiment au même moment, l’ONU décide de créer un Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC – ou IPCC en anglais. Sa mission est de réaliser une synthèse de la recherche mondiale sur le climat afin que les gouvernements, une fois informés de la situation, puissent prendre des mesures.

En 1990, le GIEC publie son premier rapport. Il confirme le lien entre activités humaines et changement climatique. Il sera suivi de quatre autres : en 1995, 2001, 2007 et 2014. Le 6ème paraîtra en 2022. Le GIEC réalise aussi des rapports spéciaux, comme en 2018 sur un réchauffement à 1,5°C ou en 2019 sur les océans.

LE SAVIEZ-VOUS ?

Le GIEC a obtenu le prix Nobel de la Paix.

Le GIEC a obtenu le Prix Nobel de la Paix en 2007, en commun avec l’ancien vice-président américain Al Gore, pour « leurs efforts de collecte et de diffusion des connaissances sur les changements climatiques provoqués par l’homme ». Le GIEC n’est pas un institut de recherche, mais un groupement de scientifiques – ils sont des milliers dans le monde à contribuer au GIEC – qui, tous les 6 ans environ, évalue la recherche existante sur le climat et en fait une synthèse pour éclairer les décideurs.

Les négociations climatiques

Le premier rapport du GIEC débouche en 1992 sur la signature de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) lors du sommet de la Terre qui se tient à Rio au Brésil. Les 196 États signataires s’engagent à stabiliser les émissions de gaz à effet de serre afin d’éviter toute perturbation dangereuse du climat. La Convention-cadre fut la première grosse victoire du droit international pour protéger le climat. Malheureusement, les actes n’ont pas suivi les paroles : depuis la signature de ce texte emblématique, les émissions de gaz à effet de serre n’ont cessé d’augmenter dans le monde.

Pour s’assurer que le climat reste en tête des priorités, des réunions, les COP, sont pourtant prévues tous les ans. La COP1 a lieu en 1995 à Berlin. Cette année-là, le second rapport du GIEC prévoit un réchauffement de la planète de 1 à 3,5°C d’ici à 2100 ainsi qu’une augmentation du niveau de la mer de 15 à 95 centimètres.

Une autre grande étape intervient en 1997. Les pays industrialisés signent alors le protocole de Kyoto : contrairement à la CCNUCC qui ne les engageait à rien de précis, le protocole de Kyoto les contraint à réduire d’au moins 5% les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici 2012 par rapport au niveau de 1990. Mais ce texte a des limites : il n’impose aucune obligation aux pays en voie de développement. Le protocole ne contraint donc pas la Chine, l’Inde ou le Brésil, mais pas non plus les États-Unis ou l’Australie, qui refusent de le ratifier… ni non plus le Canada et la Russie, qui s’en sont retirés. Autre point faible : le texte ne prévoit aucun engagement après 2012.

Une COP est donc réunie en 2009 à Copenhague pour préparer l’après 2012. Mais cette conférence est un échec. Les États ne parviennent pas à se mettre d’accord et ne décident pas d’une 2e période d’engagement. Il faudra six ans pour dépasser cet échec. Le 12 décembre 2015 lors de la COP21, les États membres de la CCNUCC parviennent à un accord historique sur le climat : l’Accord de Paris. Il entre en vigueur en 2016.

L’Accord de Paris

Les États qui ont adopté l’Accord de Paris s’engagent à renforcer leur action pour lutter contre le changement climatique, « notamment en contenant l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et en poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5°C ». Cet accord est historique car il est universel. En dépit d’intérêts divergents, il est parvenu à rassembler, pour la protection du climat, pays riches et pays pauvres, pays industrialisés et moins avancés, petites îles menacées par la montée des eaux et royaumes pétroliers…

Les États parties – par États parties, on entend les États signataires de la CCNUCC – doivent chacun soumettre des engagements précis de réduction de leurs émissions : ces promesses sont appelées les « contributions volontaires nationales » (ou NDC en anglais). Tous les cinq ans, les États doivent fournir de nouveaux engagements, plus ambitieux que les précédents. Autrement dit, à chaque fois, ils doivent s’engager à réduire encore plus leurs émissions de gaz à effet de serre.

John Kerry signant l'Accord de Paris
Conscient de l’importance de l’Accord de Paris pour les « générations futures », le secrétaire d’Etat américain John Kerry signe l’accord avec sa petite-fille sur les genoux, le 22 avril 2016 © UN Library

Historique, l’Accord de Paris présente tout de même des limites. Ainsi, il n’y a aucune sanction prévue si l’on déroge à un engagement que l’on a pris. En d’autres termes, il n’est pas question de mettre un chef d’État en prison parce que son pays n’aurait pas respecté ces règles. Une absence de sanctions qui n’a pourtant rien d’anormal en droit international. Autres points faibles : pour obtenir un consensus de tous les États, les négociateurs ont choisi de rester flous sur certains sujets pourtant essentiels, comme l’avenir des énergies fossiles ou le commerce mondial, dont les règles vont bien souvent à l’encontre de la protection du climat.

La relève de l’ambition prévue tous les cinq ans est cruciale. Car les premiers engagements sont loin d’être suffisants : si les 196 États signataires de l’accord de Paris réalisaient les promesses faites durant la COP21, la planète se réchaufferait d’au moins 3,2°C d’ici la fin du siècle, bien loin des 1,5°C nécessaires pour sauver de nombreuses populations côtières ou insulaires de la submersion. On estime que les États devraient multiplier par cinq les engagements pris en 2015 pour ne pas dépasser le seuil de 1,5°C.

La responsabilité historique des pays développés

Un des points consacrés par l’Accord de Paris est le principe des « responsabilités communes mais différenciées ». Posé dans la Déclaration de Rio de 1992, ce principe, qui se veut équitable, est systématiquement mis en avant par les pays en développement et les grands pays émergents. Il reconnaît que tous les États ont une responsabilité dans le changement climatique, mais à différents degrés. Il faut en effet tenir compte de la responsabilité historique des pays industrialisés qui les premiers ont exploité intensément les énergies fossiles et relâché de grandes quantités de CO2 dans l’atmosphère. Car si la Chine est aujourd’hui le premier émetteur de CO2 au monde, la Grande-Bretagne et les États-Unis représentaient à eux seuls 60% des émissions cumulées en 1900 et encore 50% en 1980.

Le principe des responsabilités communes mais différenciées postule qu’il serait injuste de soumettre les pays en développement aux mêmes efforts que les pays riches. En contrepartie, il oblige ces derniers à fournir une aide financière aux pays pauvres pour s’adapter au changement climatique. Certaines grandes économies émergentes comme l’Inde s’abritent derrière ce principe pour justifier le fait qu’elles auraient encore le droit d’émettre d’importantes quantités de CO2. Or les trajectoires d’émissions des États évoluent. Et la distinction entre pays développés et pays en voie de développement n’est peut-être plus aussi pertinente pour déterminer les efforts de chacun en matière de réduction des émissions.

LA QUESTION DE SUNNY

C’est quoi un migrant climatique ?

On appelle migrant climatique une personne contrainte de s’exiler à l’étranger ou ailleurs dans son pays en raison d’une catastrophe ou du changement climatique : montée des eaux, ouragans, inondations, sécheresses, baisse des rendements agricoles… Des millions d’êtres humains sont concernés. Si les îles basses et certains continents comme l’Asie du Sud et l’Afrique subsaharienne sont plus affectés que d’autres, cette problématique n’est pas spécifique aux pays du Sud. Avec un quart de leur superficie au-dessous du niveau de la mer, les Pays-Bas par exemple sont directement menacés par la montée des eaux.

Cancres et premiers de la classe

Alors que certains États ont fait de la lutte contre le changement climatique une de leurs priorités, d’autres au contraire refusent de modifier leurs habitudes ou de réduire leurs profits. Petit panorama des bons et des mauvais élèves :

A son arrivée à la présidence américaine en 2017, Donald Trump a annoncé que les États-Unis allaient sortir de l’Accord de Paris. Une bien mauvaise nouvelle pour le droit international et plus largement pour l’avenir de l’humanité. Les négociateurs ont craint que cela n’encourage d’autres pays à sortir de l’accord. Mais la Chine notamment a repris le rôle de leader, affirmant que pour sa part, elle continuerait à suivre l’accord. Et puis aux États-Unis, la décision de Donald Trump a suscité une réaction impressionnante d’États, de villes, d’entreprises ou d’universités, qui ont promis de redoubler d’efforts pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

Donald Trump n’est pas le seul à minimiser, voire nier, le changement climatique. En Russie, Vladimir Poutine défend lui aussi férocement l’extraction des ressources gazières et pétrolières. Au Brésil, le président Jaïr Bolsonaro pour sa part fait peu de cas de la forêt amazonienne, qui absorbe pourtant une bonne partie du CO2 émis par l’homme : depuis son arrivée, la déforestation a explosé, avec certains mois des surfaces déboisées quatre fois plus importantes par rapport à l’année précédente !

Dans l’Union européenne, la situation est contrastée. Si l’UE dans son ensemble est parvenue en 2018 à réduire de 2,5% ses émissions de CO2 par rapport à 2017, chaque État membre suit une politique très différente. Avec 80% de son électricité issue du charbon et peu de volonté politique de tourner la page, la Pologne affiche les moins bonnes notes. L’Allemagne est extrêmement engagée dans le développement des énergies renouvelables, elle y a consacré des centaines de milliards d’investissements et en 2019. Le problème est qu’elle reste très dépendante du charbon, qui fournit encore 38% de son électricité.

Engagements et actions réelles des membres du G7
Le Réseau Action Climat (RAC) qui regroupe plusieurs mouvements de lutte contre le changement climatique résume dans ce tableau les engagements et les actions réelles des membres du G7 concernant le climat © Réseau Action Climat

En 2008, le Royaume-Uni est devenu le premier pays au monde à se doter d’une loi pour lutter contre le changement climatique et en 2019, le premier Parlement à déclarer « l’urgence écologique et climatique ». Tout comme la France, il a annoncé en 2019 qu’il inscrirait dans la loi l’objectif de neutralité carbone en 2050. Cela signifie que, d’ici trente ans, Londres et Paris devront parvenir à l’équilibre entre leurs émissions de gaz à effet de serre et l’absorption de ces gaz par de nouvelles technologies ou par des mangeurs de carbone comme les forêts et les prairies. Si avec son slogan « Make our planet great again », le président Emmanuel Macron, s’affiche à l’international comme le champion du climat, en France, les réformes climatiques sont loin d’être suffisantes.

Le Portugal et l’Espagne ont investi massivement dans les énergies renouvelables au point qu’en mars 2018, le Portugal a réussi, grâce à ses éoliennes et ses barrages hydroélectriques, à produire plus d’électricité renouvelable qu’il n’en consomme.

Les monarchies du Golfe arabo-persique de leur côté n’ont aucune intention de faire des efforts. Étant donné que leur richesse provient essentiellement de l’extraction du pétrole et du gaz naturel, elles passent leur temps à mettre en doute la réalité du changement climatique et à bloquer les négociations internationales.

La Chine a une position difficile à définir. D’un côté, elle continue secrètement à construire de nouvelles centrales thermiques et tire plus de 70% de son électricité du charbon, de l’autre, elle a bien compris qu’elle n’avait pas d’autre choix que de prendre le virage climatique. Pleine de projets et d’initiatives, elle est devenue le champion mondial de l’énergie solaire photovoltaïque.

La situation en Inde est elle aussi compliquée. Alors que c’est l’un des pays le plus vulnérable face au changement climatique, la classe politique ne s’intéresse guère à la question. Tout comme en Australie, où le gouvernement veut continuer à utiliser ses énormes réserves de charbon, en dépit d’épisodes de sécheresse de plus en plus intenses et du blanchissement des coraux.

Parmi les bons élèves, on peut citer les pays scandinaves, l’Éthiopie, le Maroc, le Bhoutan ou encore le Costa Rica. Ce petit État d’Amérique centrale qui compte 5 millions d’habitants a fourni un plan très détaillé (bus électriques, rénovation des bâtiments…) pour parvenir à la neutralité carbone en 2050. En 2017, les Costaricains ont réussi à s’alimenter pendant 300 jours d’affilée en électricité renouvelables, sans utiliser d’énergie fossile ou nucléaire.

SUR CE SUJET, VOIR AUSSI LES FICHES

  • Qu’est-ce que le changement climatique ?
  • L’énergie dans le monde
  • Comment réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre ?
  • Quels moyens pour faire bouger les États ?
  • Et la France dans tout ça ? En fait-elle assez ?

QUELQUES SOURCES INTÉRESSANTES

LA CITATION POUR ALLER PLUS LOIN

« C’est fascinant d’entendre parler d’un côté, des pays qui parlent de survie, et de l’autre, des pays qui parlent d’intérêts économiques. »

Qui : cette phrase a été prononcée par le ministre costaricain de l’Environnement Carlos Manuel Rodriguez 

Quand : lors de la COP24 de Katowice (Pologne) en décembre 2018.

Pourquoi : Lors d’une COP se réunissent des États aux intérêts divergents. C’est ce qu’exprime ici le ministre costaricain de l’Environnement. Lors de la COP24 fin 2018 à Katowice en Pologne, l’Arabie Saoudite, le Koweït, les États-Unis et la Russie ont tout fait pour gêner les négociations. Leur intérêt était en effet de défendre leur économie basée sur l’extraction des énergies fossiles. Un intérêt financier qui était difficile à accepter par les pays les moins avancés et les plus vulnérables au changement climatique, notamment par plusieurs îles du Pacifique, menacées de disparition d’ici quelques dizaines d’années à cause de la montée des eaux. D’un côté des îles qui se battent pour leur survie, de l’autre des États pétroliers qui refusent de réduire leurs profits.

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