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Automobile : peut-on passer au tout électrique ?

Péage du San Francisco-Oakland Bay Bridge
Péage du San Francisco-Oakland Bay Bridge, à Oakland (Californie, Etats-Unis) © Yann Arthus-Bertrand

Les voitures électriques sont perçues comme l’avenir de la mobilité, mais le sont-elles vraiment ? Car si le véhicule électrique a moins d’impact sur le climat qu’un véhicule essence ou diesel, il n’est pas écologique pour autant. Les batteries notamment sont responsables d’importantes émissions de CO2.

La situation en France et dans le monde

En 2018, près de 2 millions de voitures électriques ont été vendus dans le monde, portant le parc mondial à 5 millions : la moitié a été vendue en Chine (un million), une bonne partie du reste en Europe (385 000) et aux Etats-Unis (361 000). Mais 5 millions de voitures électriques, cela ne représente que… 0,4% du parc automobile mondial ! Le chemin est encore long avant de supprimer totalement les voitures thermiques (à l’essence et au diesel), qui rejettent quotidiennement des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, contribuant ainsi au changement climatique.

En France, la vente des véhicules thermiques sera interdite en 2040. Ce qui sonne comme une excellente nouvelle. En effet, dans notre pays, les transports routiers, camions compris, contribuent à hauteur de 30% aux émissions de gaz à effet de serre. Il est donc urgent d’agir. Pour les remplacer, les voitures électriques font figure de favorites. Début 2019, un peu plus de 220 000 véhicules électriques et hybrides rechargeables circulaient sur les routes françaises. Certains prédisent qu’en 2035, ce chiffre atteindra… 16 millions ! Mais, est-il possible de faire passer tout le parc automobile à l’électrique ? Et puis, est-ce vraiment souhaitable ? Car les voitures électriques n’ont pas que des avantages.

C’est quoi au juste une voiture électrique ?

Les voitures électriques sont des véhicules équipés d’un moteur électrique. Ce moteur est alimenté par des batteries rechargeables sur le réseau électrique domestique ou sur des bornes de recharge installées dans les villes. L’autonomie dépend de la puissance de leur batterie, calculée en kilowatts-heure (kWh). Plus la batterie a la capacité de stocker de l’énergie, plus le nombre de kWh est élevé. Pour des trajets en ville et un rechargement quotidien, une petite batterie suffit, d’autant qu’elle coûte moins cher. En France actuellement, les batteries sont en général de 40 kWh, ce qui garantit une autonomie d’environ 200 km. Si des « super-chargeurs » permettent de réalimenter les batteries en 30 minutes, cette charge chez soi sur une prise classique peut, selon les modèles, prendre jusqu’à 15 heures ! Les voitures électriques n’émettent aucun gaz d’échappement, elles ne polluent donc pas l’air ambiant. Un moteur électrique nécessite très peu d’entretien comparativement à un moteur à essence ou diesel et peut avoir une durée de vie supérieure.

Il existe d’autres types de voitures électriques, comme les voitures hybrides. Celles-ci sont équipées de deux moteurs : un moteur thermique (à essence ou diesel) et un moteur électrique. Elles fonctionnent avec l’un ou l’autre selon les conditions de circulation. Les voitures hybrides rechargeables, quant à elles, ont l’avantage de pouvoir en outre se recharger sur le réseau électrique : on peut ainsi les utiliser en mode tout électrique sur les petits trajets. Les hybrides permettent de faire des économies de carburant de 10 à 40% par rapport à un véhicule thermique.

Moins de pollution

La voiture électrique a un énorme avantage : contrairement aux voitures thermiques, elle n’utilise pas de carburants fossiles. Cela signifie qu’elle n’émet pas de particules ou de gaz, qui affectent le cœur et les poumons.

Autre point : on oublie souvent la pollution sonore, mais dans de nombreuses villes, le bruit des voitures est devenu infernal et perturbe des millions d’habitants. La voiture électrique étant silencieuse, c’est un confort important à prendre en compte.

Les voitures sont meilleures pour l'environnement
Selon l’ONG européenne Transport & Environment, « les voitures électriques sont bien meilleures pour l’environnement que les voitures diesel ». © T&E

Des émissions de CO2 fortement réduites

Un véhicule électrique émet-il plus ou moins de COqu’un véhicule thermique ? C’est sur ce point qu’il y a souvent controverse.

Un point est sûr : une voiture électrique n’émet pas de CO2 lorsqu’on roule. A l’usage, c’est donc 0 gramme de CO2. Mais c’est une autre histoire si l’on prend en compte le cycle de vie entier du véhicule, en intégrant toute l’énergie consommée du berceau à la tombe, autrement dit durant l’extraction des matières premières, la fabrication, le transport ou encore le recyclage. Environ un tiers des émissions de gaz à effet de serre du véhicule électrique provient de sa production, contre moins de 10% pour un véhicule diesel. Cela est dû notamment à la fabrication des batteries et surtout à l’extraction, très énergivore, des métaux rares entrant dans leur composition.

Le point positif, c’est que ces émissions de CO2 liées à la fabrication sont progressivement compensées lorsque le véhicule électrique se met à rouler. On estime qu’au bout de 30 000 à 50 000 km, soit environ 4 ans d’utilisation, son bilan écologique devient meilleur que celui d’une voiture thermique.

Mais attention, le comparatif n’est pas terminé : durant la phase d’usage, il faut vérifier d’où vient l’électricité qui alimente la batterie. En effet, dans des pays comme la Pologne ou la Chine qui produisent la majorité de leur électricité à partir du charbon, les véhicules électriques entraîneront de nouvelles émissions de CO2 à chaque recharge. Ce qui n’est pas le cas dans des pays comme la France ou la Suède, où l’électricité est « décarbonée » puisqu’elle vient essentiellement du nucléaire et des énergies renouvelables.

Tout compte fait, à la fin de sa vie, une voiture électrique roulant en France aura émis deux à quatre fois moins de CO2 qu’un véhicule thermique. Un avantage qui se maintient même si la batterie a été fabriquée en Chine en utilisant de l’électricité carbonée. En revanche, une voiture électrique roulant en Chine aura un bilan carbone bien moins bon, tant que son électricité viendra du charbon.

Les émissions de gaz à effet de serre des véhicules électriques en fonction du mix électrique
Les émissions de gaz à effet de serre des véhicules électriques en fonction du mix électrique © Eucheck France, à partir des données de Transport&Environment

Des batteries peu écologiques et mal recyclées

Aujourd’hui, la quasi-totalité des batteries sont produites en Asie dans des pays où la production d’électricité utilise principalement le charbon. Pour améliorer leur bilan environnemental, on pourrait rapatrier leur construction en Europe, et la rendre plus propre et moins énergivore.

Une batterie de voiture électrique pèse très lourd, entre 250 et 500 kilos. Pour la fabriquer, il faut de nombreux métaux comme le nickel, le lithium, le cobalt ou le manganèse. L’extraction et le traitement de ces métaux ont de lourds impacts pour l’environnement. En République démocratique du Congo, premier producteur de cobalt, ce minerai est extrait dans des conditions souvent déplorables, recourant parfois au travail des enfants, tandis que le lithium prélevé en Australie, au Chili ou en Argentine tire dangereusement sur les ressources en eau.

Le recyclage des batteries est donc un point essentiel, puisqu’il permet d’extraire moins de minerai et de limiter leurs effets sur le lieu d’extraction. Mais à ce stade, seul 50% du poids de la batterie est recyclé en Europe, alors qu’en théorie, on est capable d’en recycler 95%.

Emission de GES d'une batterie
Emissions de gaz à effet de serre d’une batterie de 40 kWh durant tout son cycle de vie, selon qu’elle est fabriquée en France, en Pologne, en Chine ou en Corée du Sud © Etude RTE/Avere, 2019

La voiture électrique n’est plus si chère

A l’achat, une voiture électrique est plus chère qu’une voiture thermique, notamment en Europe, car les constructeurs investissent peu sur cette technologie. Mais cela est en train d’évoluer, d’autant que les États versent de généreuses subventions à ceux qui optent pour l’électrique. Au bout du compte, le coût total d’un véhicule est désormais proche, voire inférieur, à celui d’un diesel ou d’une essence dès 4 ans de possession.

LA QUESTION DE SUNNY

C’est quoi le système du bonus-malus ?

Le bonus est une aide financière qui incite les particuliers à acheter une voiture qui émette peu de CO2. Plus les émissions sont faibles, plus le bonus est élevé. A l’inverse, le malus est une taxe exigée sur les voitures neuves qui émettent beaucoup de CO2. Plus les émissions sont fortes, plus le malus est élevé.

Va-t-elle faire disjoncter notre réseau électrique ?

Si en 2035, la France comptait bel et bien 16 millions de voitures électriques, cela ne risquerait-il pas de peser trop lourd sur notre système électrique et de le faire disjoncter ? RTE, la filiale d’EDF en charge du transport d’électricité, assure que le réseau français pourra sans aucune difficulté supporter cette nouvelle charge. Enfin…  à condition que tout le monde ne recharge pas sa voiture en même temps, le soir à 18 heures en rentrant du travail !

Un véhicule particulier n’est utilisé, en moyenne, que 4% du temps. Le reste du temps, il  est  stationné, à domicile ou sur le lieu de travail. Un nombre important de véhicules électriques pourrait donc être raccordé au réseau en quasi-permanence.

Le véhicule électrique pourrait être utilisé comme un moyen de stockage hyper flexible. Par exemple, pourquoi ne pas programmer sa charge entre midi et deux, lorsque la production d’énergie solaire est plus importante ? Ou la nuit entre 2 heures et 4 heures, lorsque la consommation domestique est au plus bas ? Et pourquoi ne pas puiser dans la batterie de ce même véhicule lors d’un pic de consommation ? Ainsi utilisé, le véhicule électrique pourrait aider à lisser les périodes de forte consommation et les pics de production dus aux énergies renouvelables. L’utilisateur serait rémunéré chaque fois qu’il rendrait ainsi service au système électrique.

LE SAVIEZ-VOUS ?

Une voiture “Jamais-contente” mais ultra-rapide !

Le premier véhicule automobile à avoir franchi le cap des 100 km/h était une voiture électrique ! De la forme d’une torpille sur roues, cette voiture avait été baptisée la “Jamais-Contente”. Le 29 avril 1899, sur une route des Yvelines, ce petit bolide, alors piloté par le Belge Camille Jenatzy, atteignit la vitesse record de 105,88 km/h. Malgré cet exploit, le moteur à combustion, qui fonctionne au pétrole, supplantera au 20e siècle la technologie électrique, les batteries restant trop lourdes et longues à recharger.

La Jamais-Contente
Le pilote belge Camille Jenatzy et son épouse juchés sur la Jamais-Contente

Alors, on passe au 100% électrique ?

Le véhicule électrique a donc moins d’impact sur le climat qu’un véhicule thermique mais il n’est pas écologique pour autant. Pour compenser la « dette CO2 » due à la fabrication des batteries, la phase d’usage des véhicules électriques doit être la plus longue possible : on devrait les mettre en auto-partage ou les utiliser plus de 20 ans.

Mais il ne faut pas croire que le milliard de véhicules roulant aujourd’hui sur la planète fonctionnera demain à l’électricité. Déplacer une seule personne dans un véhicule de plus d’une tonne n’est pas durable, qu’il fonctionne au pétrole ou au courant électrique. Il est indispensable d’alléger les véhicules, d’augmenter leur taux de remplissage, d’en diminuer le nombre, de favoriser le vélo et les transports en commun… En résumé, il faut repenser la mobilité et changer nos comportements.

AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS DE LA VOITURE ÉLECTRIQUE

Les plus

  • Pas d’émissions de CO2 durant l’utilisation dans des pays comme la France où l’électricité est décarbonée
  • Meilleure qualité de l’air : pas de gaz d’échappement nocif pour la santé, ni de particules fines
  • Sur tout le cycle de vie, moins d’émissions qu’un véhicule thermique si on roule beaucoup
  • Silencieux, réduit la pollution sonore
  • Une voiture qui recharge sa batterie peut servir à équilibrer le système électrique. Elle peut notamment permettre de mieux utiliser l’électricité issue des énergies renouvelables

Les moins

  • Émissions de CO2 durant l’utilisation dans des pays comme la Chine où l’électricité provient du charbon
  • Émissions de CO2 durant la fabrication des batteries (extraction de métaux rares)
  • Impact sur l’environnement dans les pays où sont extraits les métaux rares
  • Recyclage insuffisant des batteries
  • On ne fait que changer de véhicule alors qu’il est essentiel de réinventer notre façon de nous déplacer et de développer les transports en commun pour moins consommer moins d’énergie

SUR CE SUJET, VOIR AUSSI LES FICHES

  • Le pétrole
  • Les transports
  • Pour ou contre les biocarburants ?
  • POSTER / Se déplacer en émettant moins de CO2

QUELQUES SOURCES INTÉRESSANTES

LE DOCUMENT POUR ALLER PLUS LOIN

La voiture à hydrogène, une aventure asiatique

Dans l’article ci-dessous, Le Parisien parle d’une annonce de la Chine au sujet des voitures à hydrogène :

Transports : la Chine prépare sa société de l’hydrogène, 15 juin 2019, Le Parisien

Petit décryptage pour mieux comprendre les enjeux :

Une voiture à hydrogène est une voiture électrique dont les batteries sont remplacées par une pile à combustible, elle-même alimentée par un réservoir d’hydrogène pur. Ce procédé ne rejette que de la vapeur d’eau.

Comme une voiture électrique, une voiture à hydrogène est donc bien un véhicule zéro émission mais, encore une fois, le problème se situe en amont. L’hydrogène est très abondant, mais il est associé à d’autres éléments, il faut donc l’extraire, le plus souvent à partir d’hydrocarbures comme le gaz naturel. C’est là que les choses se compliquent, car ce processus d’extraction libère énormément de gaz à effet de serre et nécessite le recours aux énergies fossiles. Le bilan écologique de la voiture à hydrogène n’est donc pas très vert. Pour obtenir de l’hydrogène propre, il faudrait le produire à partir des énergies renouvelables grâce à un procédé, l’électrolyse de l’eau, qui est encore très coûteux. La production de masse de cet hydrogène vert est un enjeu majeur de la transition énergétique.

Les véhicules à hydrogène sont encore très peu répandus. En effet, Volkswagen, Ford, General Motors ainsi que les constructeurs français ont choisi d’investir massivement dans la voiture électrique rechargeable. Seuls les fabricants asiatiques comme Honda, Toyota, Kia et Hyundai se sont lancés dans la révolution de l’hydrogène. La Chine a d’ailleurs décidé récemment de suivre cette voie. En juin 2019, elle a annoncé de manière radicale qu’elle supprimait toutes ses subventions en faveur de l’automobile électrique classique pour les réorienter vers les voitures à hydrogène. Elle ambitionne de passer de 2 500 voitures à hydrogène à un million en 2030 !

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